Jeudi 3 septembre à six heures du matin, six fonctionnaires de la police judiciaire et de la brigade anti-terroriste étaient à mon domicile
, alors que mon épouse et moi étions absents.Sans l’intervention d’une voisine, alertée par le vacarme, ils auraient probablement enfoncé la porte. Après avoir pris rendez vous, ils sont revenus le lendemain matin pour procéder à une perquisition, prise d’ADN , échantillon graphologique et interrogatoire. Je me suis opposé à la perquisition au relevé d’écriture et à la prise d’ADN. N’ayant pas de mandat de perquisition, ils ont été obligés d’en demander un au procureur anti-terroriste du tribunal de grande instance de Paris. Le procureur a refusé de délivrer ce mandat !
Cela s’est produit dans le cadre de la chasse au "corbeau" qui, selon la presse, mobilise la fine fleur de la police nationale. Jeudi 3 septembre il y avait près de 150 policiers mobilisés :brigade anti-terroriste, direction
centrale du renseignement intérieur, police judiciaire parisienne, pilotés par un procureur anti-terroriste du tribunal de grande instance de Paris.
Une vingtaine de personnes ont été interrogées, perquisitionnées à 6 heures du matin, 11 mises en garde à vue pour trois jours, sans possibilité de contact extérieur.
La presse a abondamment fait état des pressions exercées "en haut lieu" sur la police. L’arrestation d’un corbeau psychopathe qui signe "cellule 34" présente peu d’intérêt pour le pouvoir, par contre l’arrestation d’un groupe terroriste offre des possibilités d’exploitation politique.
La police va donc tenter de le fabriquer de toute pièces.
A un buraliste, militant communiste, on a donné le rôle du suspect principal, au prétexte qu’il envoie de nombreuses lettres, parfois un peu rudes, aux élus et qu’il s’agit d’un ancien légionnaire. Contrairement au corbeau il signe ses lettres. Il n’est pas le seul à posséder des armes et des balles dans un secteur où CPNT a réalisé jusqu’à 45 % des voix. Mais tous les possesseurs
d’armes ne sont pas des corbeaux potentiels !
Autour de lui, pour donner consistance au "groupe terroriste" la police va embarquer des militants communistes et des clients du bureau de tabac. Un plâtrier qui attendait l’ouverture du magasin pour acheter son paquet de cigarettes a lui aussi été embastillé. Et pour faire bonne mesure la police s’intéresse aux militants syndicaux et associatifs.
Les notables locaux de l’UMP ont eux aussi été inquiétés. Est-ce pour faire croire qu’il ne s’agit pas d’une manoeuvre politique, ou parce qu’ils fréquentent le bureau de tabac, ou bien parce qu’ils sont opposants à l’élu local ? Comment a été constituée la listes des personnes qui ont eu affaire à la police ? La question reste posée. La police a contacté les maires du secteur pour leur demander si dans leur commune il y aurait des gens susceptibles d’être des suspects. Midi Libre remarque fort justement que le seul point commun entre toutes les personnes auditionnées était de s’être opposées à un moment ou un autre au député (PS), maire de Saint Pons, vice président du conseil général, vice président de la communauté de communes...
Quand j’ai demandé à un des policiers quels étaient les indices qui l’avaient conduit à venir m’interroger, il a reconnu qu’après le suspect n°1 et quelques proches, les citoyens militants étaient prioritairement ciblés. Était ce pour faire nombre ou pour les intimider ?
Malgré la pression mise sur les personnes en garde à vue, la police a du les libérer faute d’avoir la moindre preuve. On pouvait craindre que se reproduise l’injustice dont a été victime Julien Coupat, incarcéré pendant plus de six mois, suspecté, sans le moindre indice ni la moindre preuve, d’avoir formé une « cellule invisible » à laquelle est imputé le sabotage d’une caténaire de TGV.
Tout ceci est emblématique d’une police qui déraille sous la pression d’un pouvoir qui perd les pédales, et qui préfère fabriquer des faux coupables plutôt que de prendre le temps de trouver le vrai...s’il existe. C’est de la police spectacle, police bling-bling !
Pour analyser les écritures,les policiers ont dicté "Le corbeau et le renard" à ceux qui ont été interrogés (preuve qu’ils ont de l’humour !). Si le corbeau est celui qui écrit les lettres de menace, le rusé renard ne saurait en aucun cas représenter la police. Le corbeau n’a pas lâché son fromage, et les poulets ont fait chou blanc. Maintenant il reste à dénoncer les procédés, demander des explications et exiger réparation pour le préjudice moral subi.
Jean Sabench, apiculteur est porte parole de la commissions Pesticide de la Conf Paysanne.
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