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Etat d’urgence, 6 parlementaires ont donné la voix à la sagesse

Quelques voix discordantes....

Regader les causes

dimanche 22 novembre 2015, par Forum Civique Européen

L’écrivain et historien David van Reybrouck a écrit à François HOLLANDE : Monsieur le Président, vous êtes tombé dans le piège... L’ancien juge antiterroriste Marc Trévidic parle des relations malsaines franco qatarie et des alliances américaines avec des pays comme l’Arabie Soaudite... L’ancien député allemand le démocrate-chrétien Juergen Todenhöfer a exprimé sa colère bien avant les évènements de Paris en s’adressant à tous les gouvernements. Noël Mamère observe les antécédents français des états d’exceptions et fait parti des 6 voix parlementaires qui s’opposent à l’Etat d’urgence. Les méthodes guerrières des derniers vingt-cinq ans ont mené à ce que nous nous vivons aujourd’hui. Ce ne seront surtout pas ces méthodes - là qui nous sortirons de cette spirale de la violence... URGENCE RÉFLÉCHIR ou comme André Benedetto l’inventeur du Festival off d’Avignon avait l’habitude de dire : „Urgence crier“.

Recueil de textes avec les liens vers leur intégralité.

L’auteur et historien David Van Reybrouck.

David Van Reybrouck, d’expression néerlandaise, est l’auteur de nombreux ouvrages dont Congo, une histoire (Ed. Actes sud), pour lequel il a notamment reçu en 2012 le prix Médicis dans la catégorie « essai ». L’écrivain et historien interpelle le président français sur le champ lexical guerrier de son discours, samedi 14 novembre, lendemain des attentats qui ont endeuillé Paris. Et sur la surenchère que cela pourrait entraîner.


Extrait du Monde 16/11/2015

Monsieur le Président,
Le choix extraordinairement irréfléchi de la terminologie que vous avez utilisée dans votre discours de samedi après-midi [14 novembre 2015], où vous répétiez qu’il s’agissait d’un « crime de guerre » perpétré par « une armée terroriste » m’a interpellé. Vous avez dit littéralement :

« Ce qui s’est produit hier à Paris et à Saint-Denis, près du Stade de France, est un acte de guerre et, face à la guerre, le pays doit prendre les décisions appropriées. C’est un acte de guerre qui a été commis par une armée terroriste, Daech [l’acronyme arabe de l’Etat islamique], une armée de terroristes, contre la France, contre les valeurs que nous défendons partout dans le monde, contre ce que nous sommes, un pays libre qui parle à l’ensemble de la planète. C’est un acte de guerre qui a été préparé, organisé, planifié de l’extérieur et avec des complicités intérieures que l’enquête fera découvrir. C’est un acte de barbarie absolue. »

Si je souscris pleinement à la dernière phrase, force est de constater que le reste de votre discours est la répétition angoissante et presque mot à mot de celui que George W. Bush a tenu devant le Congrès américain peu après les attentats du 11-Septembre : « Des ennemis de la liberté ont commis un acte de guerre contre notre pays. »

Destabilisation de la région
Les conséquences de ces paroles historiques sont connues. Un chef d’Etat qui qualifie un événement d’« acte de guerre » se doit d’y réagir, et de rendre coup pour coup. Cela a conduit M. Bush à l’invasion de l’Afghanistan, ce qui était encore admissible parce que le régime avait offert asile à Al-Qaida. Même l’ONU avait approuvé. S’en est suivi alors l’invasion totalement démente de l’Irak, sans mandat de l’ONU, pour la seule raison que les Etats-Unis soupçonnaient que ce pays détenait des armes de destruction massive. A tort, s’est-il avéré, mais cette invasion a conduit à l’entière déstabilisation de la région, qui se prolonge jusqu’à aujourd’hui.

Le départ des troupes américaines en 2011 a laissé le pays dans une vacance du pouvoir. Et c’est peu après, lorsque, dans le sillage du « printemps arabe », une guerre civile a éclaté dans le pays voisin, que l’on a pu constater à quel point l’invasion militaire américaine avait été pernicieuse. Dans le nord-ouest de l’Irak déraciné et l’est de la Syrie déchirée, entre l’armée gouvernementale et l’Armée syrienne libre, assez d’espace s’était manifestement créé pour que se lève un troisième grand acteur : l’Etat islamique, ou Daech.

Bref, sans l’invasion idiote de Bush en Irak, il n’aurait jamais été question de Daech. C’est par millions que nous avons manifesté contre cette guerre en 2003, moi aussi, et la désapprobation était universelle. Et nous avions raison. Cela, non pas parce que nous étions capables de prédire l’avenir, nous n’étions pas clairvoyants à ce point. Mais nous en sommes pleinement conscients aujourd’hui : ce qui s’est passé dans la nuit de vendredi à Paris est une conséquence indirecte de la rhétorique de guerre que votre collègue Bush a employée en septembre 2001.
[….]
Il existe d’autres formes de fermeté que le langage de la guerre. Immédiatement après les attentats en Norvège, le premier ministre Jens Stoltenberg a plaidé dans détours pour « plus de démocratie, plus d’ouverture, plus de participation ». Votre discours fait référence à la liberté. Il aurait aussi pu parler des deux autres valeurs de la République française : l’égalité et la fraternité. Il me semble que nous en avons plus besoin en ce moment que de votre douteuse rhétorique de guerre.

David Van Reybrouck

L’ancien juge antiterroriste Marc Trévidic parle sur France 2 des relations malsaines franco qataries et des alliances américaines avec des pays comme l’Arabie Soaudite...

Marc Trévidic est devenu en septembre dernier premier vice-président du tribunal de grande instance de Lille après dix ans de spécialisation dans l’antiterrorisme à Paris. [...] Des enquêtes complexes ont pris un tournant majeur sous son instruction. En une décennie (de mai 2006 à septembre 2015), Marc Trévidic est devenu un personnage incontournable de la magistrature. En tant que juge antiterroriste au tribunal de grande instance de Paris, il avait en charge des dossiers extrêmement sensibles qui dérangeaient jusqu’au sommet de l’État comme l’attentat de Karachi en 2002, l’assassinat des moines de Tibhirine en 1996 ou l’attentat de la rue des Rosiers en 1982, pour lequel il a lancé début mars des mandats d’arrêt internationaux contre trois suspects.

Voici le lien vers l’entretien avec Marc Trévidic du journales de France 2

Jürgen Todenhöfer (JT), ancien député allemand a écrit une lettre en colère aux gouvernants le 23 août 2015.

JT, ancien journaliste, travaillait dans le management de média jusqu’à 2008, il siégeait dans le Conseil d’administration des Éditions BURDA. JT était de 1972 à 1990 député de la CDU (démocrate-chrétien ) du parlement allemand et faisait parti de la fraction surnommé « STAHLHELM », cad de l’aile droite au sein de son parti. Suite à ses enquêtes en Afghanistan, en Irak, dans les pays du printemps arabe et dans les États musulmans, il milite contre les politiques guerrières

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Source : https://www.facebook.com/juergentodenhoefer/posts/10153191192290838

Aux Présidents et leurs Gouvernements !

Messieurs !

Depuis des décennies, vous avez poussé des millions d’humains au Moyen Orient et en Afrique dans la misère avec votre politique de guerre et d’exploitation. A cause de vous, des millions d’humains se sont exilés et sont réfugiés. Un réfugié sur trois en Allemagne vient de la Syrie, de l’Irak et de l’Afghanistan. Un sur cinq vient du continent africain.
Vos guerres sont la cause du terrorisme mondial. Au lieu de quelques centaines de terroristes internationaux comme il y a 15 ans, nous en avons maintenant plus de 100.000. Votre cruauté cynique se retourne contre nous comme un boomerang.
Comme d’habitude, vous ne pensez pas à changer votre politique. Vous ne vous occupez que des symptômes (et surtout pas des causes NdlR). Ainsi la situation sécuritaire devient de jour en jour plus chaotique et dangereuse. De plus en plus de guerres, de vagues de terreur et de problèmes de réfugiés détermineront l’avenir de notre planète.
La guerre frappera un jour de nouveau aux portes de l’Europe. Tout homme d’affaires qui agirait comme vous serait immédiatement congédié ou mis en en prison. Vous êtes des minables.

Les peuples du Moyen-Orient et d’Afrique, dont les pays ont été détruits et pillés par vous, et les peuples d’Europe, qui accueillent désormais d’innombrables réfugiés désespérés, payent le prix fort pour votre politique. Mais vous vous en lavez les mains. Vous devriez comparaître immédiatement devant la Cour pénale internationale. Et chacun de vos sympathisants politiques devrait subvenir aux besoins d’au moins 100 familles de réfugiés.

Fondamentalement, les peuples du monde devraient maintenant se soulever et vous résister, à vous qui êtes des fauteurs de guerres et des exploiteurs. Une résistance non violente comme la désobéissance civile de Gandhi. Nous devrions créer de nouveaux mouvements et partis. Mouvements pour la justice et l’humanité et punir les fauteurs de guerres dans d’autres pays, comme les assassinats et les homicides dans nos pays. Quant à vous, qui êtes responsables de la guerre et de l’exploitation.
Assez ! Disparaissez ! Le monde serait beaucoup plus beau sans vous.

Jürgen Todenhöfer

Noël MAMERE

Noël Mamère, est un ancien journaliste et homme politique français, partisan d’une écologie politique. Membre des Verts, avant de rejoindre Europe-Écologie les Verts (EELV), il est maire de Bègles, en Gironde, depuis 1989 ; et député de la troisième circonscription de la Gironde depuis 1997. Il a quitté EELV en 2013. (Source wikipedia.fr)


[…] Nous avons aujourd’hui le devoir de défendre la société, une société de libertés, contre tous ceux qui chercheront à les remettre en cause, à les rogner, une société d’égalité pour tous contre tous ceux qui discrimineront en fonction de la couleur de peau, de la religion, du sexe… Une société de fraternité et de solidarité.
Nous sommes en guerre, certes, mais ce n’est pas une raison pour sombrer dans le renoncement à ce qui est le sens même de nos valeurs. Le « pacte sécuritaire » qui nous est proposé, n’est qu’une habile triangulation pour faire avaler à la gauche la camelote de la droite : état d’urgence prorogé de trois mois sans explication, et éventuelles modifications profondes décidées dans l’urgence de l’émotion, interdiction des manifestations, approbation du principe de déchéance de la nationalité, expulsions massives, régression de l’Etat de droit par la constitutionnalisation d’un Patriot Act à la française… Ce n’est rien d’autre qu’une logique de guerre intérieure permanente qui nous est imposée à la faveur du massacre du vendredi noir. Elle n’en sera pas plus efficace pour autant. Notre besoin n’est pas de banaliser le tout sécuritaire, mais de renforcer les moyens de renseignement et de contre terrorisme, de justice et de police sur le terrain, de faire moins d’esbroufe pour faire croire que l’on protège la population et plus d’infiltrations et d’asséchement des réseaux, plus de politique internationale et moins de vente d’armes à des régimes qui encouragent, de fait, l’insurrection djihadiste.
Une dernière remarque, cet événement nous aura appris au moins une chose : nous savons maintenant ce qui pousse des femmes, des hommes, des enfants, à risquer leur vie en traversant la méditerranée et à errer de murs en murs à travers l’Europe. Ils ont les mêmes visages que ceux qui ont été assassinés lâchement au Bataclan ou rue de Charonne, vendredi soir, mais ils en ont connu des dizaines chez eux. Ce n’est pas la France qui est touchée, c’est l’humanité que l’on assassine à Paris, à Alep ou ailleurs. C’est nous. La seule Union Sacrée qui vaille, c’est celle de l’humanité blessée, qui doit oser se révolter contre la barbarie.

A l’Assemblé Nationale le 19 novembre 551 députés ont voté la prolongation de l’état d’urgence après les attentats de Paris. Seuls 6 ont voté contre, en plus d’une abstention. Ils en ont donné les raisons. Source AFP.

Noël Mamère (Les Verts)
"La lutte contre le fanatisme de ces islamofascistes va durer bien plus longtemps [que trois mois], devons-nous pour autant accepter de vivre dans un état d’exception permanent ? Nous devons prouver que nous sommes capables de réagir à ces infamies par des dispositifs respectueux des libertés fondamentales, par un état de droit fort qui ne distribue pas à la police et à l’exécutif des pouvoirs normalement dévolues à la Justice."  

Pouria Amirshahi, député des Français établis hors de France (PS)

Dans une tribune publiée dans Le Monde, il estime d’abord que la prolongation se fait "dans la précipitation". Il y explique que "les actions de justice de police ont montré que le besoin prioritaire de moyens et de coordination entre services était plus important sans doute que les dispositifs exorbitants de droits communs accordés aux services de sécurité que constituent par exemple la dernière loi renseignement ou une durée anormalement longue d’un état d’urgence". 
A lire, sa tribune : Pourquoi je voterai contre la prolongation à 3 mois d’un état d’urgence 

Barbara Romagna, député du Doubs (PS)
"Pourquoi décider dès le 19 qu’il faudra le prolonger alors que nous avons jusqu’au 25 pour en juger ? s’interroge-t-elle sur son site. De plus, dans un contexte où les terroristes cherchent précisément à réduire nos libertés, n’est-il pas paradoxal que nous les restreignions nous-même ?".
A lire, son post de blog : Attentats du 13 novembre l’urgence d’apaiser 

Gérard Sebaoun, député du Val d’Oise (PS)

Le socialiste s’est expliqué dans tweet. Il s’y est dit en faveur de la prolongation de l’état d’urgence, mais refuse en revanche "le projet de loi parce qu’il élargit le pouvoir administratif". 
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Isabelle Attard, députée du Calvados (EELV)

"La prolongation de l’état d’urgence ne permet qu’une seule chose nouvelle : la mise à l’écart des juges, et donc de la justice. Les policiers doivent présenter des preuves aux juges. C’est une étape obligatoire pour ne pas perdre un temps précieux à détruire la vie d’innocents. Diminuer nos libertés n’empêchera pas de nouveaux attentats".
A lire, son post de blog : Nul, par la guerre, ne devient grand 
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Sergio Coronado, député des Français de l’étranger (Les Verts)

"Parce que mon intime conviction est que l’état d’urgence n’offre aucune supériorité opérationnelle dans la lutte contre le terrorisme, qu’il représente tout au contraire une suspension de notre état de droit, et donc des risques pour nos libertés, j’ai décidé de voter contre le projet de loi qui proroge l’état d’urgence" (Source Huffington Post). 
A lire, sa tribune : Pourquoi j’ai voté contre la prolongation de l’état d’urgence 

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