Les invités de cette campagne d’information
sont membres du Réseau des gardiens de semences en vie. Créé en 2002, ce mouvement qui regroupe plusieurs dizaines d’organisations autonomes dans l’ensemble de la Colombie, lutte quotidiennement pour la reproduction et l’échange de semences locales. Il intervient aussi dans les médias pour informer des conséquences néfastes sur les petits agriculteurs du Traité de Libre Commerce (TLC) signé avec les Etats-Unis.
Ce TLC, entré en vigueur le 15 mai 2012, a entraîné la suppression de toute contrainte douanière ou quota d’importation , la privatisation des entreprises stratégiques (électricité, télécom, banques...) et le rapatriement des bénéfices colossaux des multinationales étasuniennes. Il a aussi facilité l’implantation de multinationales étasuniennes sur le sol colombien. En signant cet accord, la Colombie s’est engagée à n’utiliser que les semences référencées. De ce fait, et sans le savoir , les paysans sont hors-la-loi s’ils continuent à cultiver comme ils le font depuis toujours : produire leurs propres semences pour leurs prochaines cultures ! En effet, la résolution prévoit amendes, voire peines d’emprisonnement pour ceux qui utilisent des semences non référencées. On assiste alors à la ruine des paysans qui ne peuvent rivaliser avec des coûts de production qui sont plus importants que ce que leur rapporte la vente de leurs cultures (les intrants agricoles se vendent jusqu’à 80 % plus cher en Colombie que sur le marché international).
Ainsi, le monopole de l’agriculture est laissé aux multinationales qui ont seules la capacité de certifier les semences selon des critères de stabilité et d’homogénéité.
Prenant conscience des effets désastreux de cet accord sur la pratique et l’économie paysanne de la Colombie, des grèves se sont succédées de septembre 2012 à octobre 2013. Initiées par les producteurs de café et le monde paysan, c’est bientôt les étudiants et d’autres organisations extra-agricoles qui se joignent aux revendications, prenant de plus en plus d’ampleur, jusqu’à parvenir à bloquer pendant 20 jours l’accès à certaines villes dont la capitale Bogota.
Les conséquences de ces mobilisations ont eu pour effet le gel de la résolution du TLC concernant les semences (la résolution 970). Mais en l’absence d’une nouvelle, c’est l’ancienne résolution qui reste en vigueur. L’objectif pour les gardiens de semences est clairement d’abroger ce Traité.
Le documentaire « RESOLUCION 970 », réalisé par Victoria Solano, une militante chilienne, témoigne de la répression des autorités envers les paysans (plus d’un million de kilos de semences détruites entre 2010 et 2011) et fait connaître les réseaux de résistances existants.
VOIR le documentaire RESOLUCION 970 sur YOU TUBE
Le cas de la Colombie est loin d’être marginal : au printemps 2013, la Commission Européenne a proposé de nouveaux règlements concernant la santé dans l’alimentation. Parallèlement, durant l’été 2013, un nouvel accord de libre échange avec les Etats-Unis est en cours de négociation.
Ces règlements ne laissent aucune marge de manœuvre aux différents pays européens. S’ils sont approuvés par la Commission, ils devront être appliqués. Sous des couverts de traçabilité justifiés par les récents scandales alimentaires, la Commission souhaite pouvoir centraliser les systèmes de contrôle de tout le secteur agricole européen.
Le règlement concernant les semences est de loin le plus contesté. Tous les producteurs de semences (hors cadre familial) auront l’obligation de justifier de leurs activités et de se soumettre aux opérations de contrôle.
L’objectif de ces règlements n’est ni de favoriser l’échange des semences ni de développer l’agriculture paysanne en Europe. En soumettant tous les agriculteurs aux mêmes normes, malgré les grandes différences de contextes et de territoires, le choix d’une agriculture industrielle centralisée est fait au détriment d’organisations paysannes autonomes, et notre dépendance envers les multinationales s’aggrave.
Quelle différence existe-t-il alors entre la Colombie et l’Europe ?
Les intérêts industriels cherchent, ici et là-bas, à prévaloir sur les institutions. Comme cela s’est fait avec la Colombie, l’accord commercial bilatéral imaginé entre l’Union Européenne et les Etats-Unis prévoit l’abolition des barrières douanières et le démantèlement de toutes les normes qui limitent le profit des entreprises. Les états pourraient être poursuivis si certaines de leurs normes venaient entraver le champ des investissements.3
La lutte des gardiens de semences colombiens nous concerne donc pleinement. Il s’agit de déconstruire les traités troubles cherchant à légiférer nos vies, que l’on travaille la terre ou non.
Rendez-vous donc le vendredi 28 mars pour mettre en commun nos informations et nos revendications sur ce sujet.
VENDREDI 28 mars 2014 à 19h Maison de la Vie Associative ARLES
La délégation de trois colombiens en lutte est accueillie par
ATTAC Arles
le Forum Civique Européen
et JOURARLES