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Les oiseaux migrateurs, boucs émissaires de la dispersion de la grippe aviaire

dimanche 15 avril 2007, par ab (JournArles)

Une article publié récemment dans la revue internationale d’ornithologie, Ibis, examine attentivement les arguments selon lesquels les oiseaux migrateurs auraient favorisés la dispersion du virus H5N1 hautement pathogène de la grippe aviaire à travers le monde.

Les écologistes de la Tour du Valat (Camargue) et du GEMI-CNRS, Michel Gauthier-Clerc, Camille Lebarbenchon et Frédéric Thomas concluent que les activités commerciales, en particulier celles liées à la volaille, sont les principaux facteurs qui ont contribué à sa dispersion.

Le sous-type fortement pathogène H5N1 du virus de la grippe aviaire a été détecté pour la première fois chez des volailles en novembre 1996 dans le sud-est de la Chine. Le virus a plus tard dispersé dans la plupart des pays asiatiques, puis en Afrique et en Europe. A partir de la mi-2005, les oiseaux migrateurs ont été considérés comme la première source de dispersion du virus en dehors de l’Asie. Cette mise en cause a principalement reposé sur la découverte en mai 2005 de centaines d’oiseaux sauvages mort sur le lac Quinghaihu, situé sur les hauts plateaux de Chine. Il est cependant clair que la trajectoire du virus ne correspond pas à aux principales routes migratoires des oiseaux sauvages. Cet attachement à l’hypothèse d’une dispersion par les oiseaux migrateurs, s’avère être un leurre qui a, semble-t-il, dissimulé la mondialisation - sans règle sanitaires stricte - des échanges de volaille. C’est pourtant ce mécanisme le plus probable facteur de propagation de la maladie.

Pendant les epizooties précédentes des sous-types fortement pathogènes de H5 et de H7, on a montré que l’expansion de ces virus était du aux activités humaines, en particulier, aux mouvements de volailles ou de leurs produits. Ce scénario commercial est celui qui a expliqué l’expansion et le maintien du virus H5N1 dans le sud-est de l’Asie jusqu’en 2004, par l’intermédiaire des échanges légaux et illégaux de volailles.

Les cas observés en Europe de l’ouest en février 2006 après un coup de froid sur la Mer Noire ont prouvé que le virus peut se déplacer sur de courtes distances avec les oiseaux sauvages, mais aucune preuve d’une transmission de fond pendant la migration saisonnière n’a été trouvée. Les faits confirment avant tout l’hypothèse que les mouvements de volailles domestiques sont le principal agent de la dispersion globale du virus. L’occurrence d’un outbreak dans une ferme commerciale de dinde du Suffolk en Angleterre, en février 2007 confirme là encore cette hypothèse.

Les oiseaux sauvages, en particulier les oiseaux aquatiques, sont un élément principal de l’écologie virale de la grippe aviaire faiblement pathogène. Les très fortes densités d’animaux domestiques et les facteurs de stress accrus sont particulièrement favorables pour le maintien et la transmission d’agents virulents, en particulier les sous-types de la grippe aviaire hautement pathogène.

Paradoxalement, la propagation récente du virus H5N1 couplée à une crainte de transmission par les oiseaux sauvages semble aujourd’hui mener à un retour à l’élevage en batteries qui accentue les risques de développement et de propagation du virus.
Cette accélération de l’industrialisation est à contre-courant d’une tendance visant à améliorer le bien-être des animaux et en particulier le développement des élevages en plein air. Maintenir ces pratiques respectueuses du bien être animal, tout en contrôlant la maladie par un suivi vétérinaire minutieux et un meilleur contrôle sur le commerce des volailles, serait pourtant une bien meilleure stratégies pour lutter contre cette maladie.

traduction libre de BOU news

L’article auquel il est fait référence est
"Gauthier-Clerc, M., Lebarbenchon, C. & Thomas, F. Recent expansion of highly pathogenic avian influenza H5N1 : a critical review. Ibis 2007. DOI 10.1111/j.1474-919x.2007.00699.x"

la rédaction

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