Ainsi, la Marocaine Naïma Farrie, issue d’une civilisation paysanne en voie de disparition, témoigne de la violence produite par un système où les paysans ont laissé la place à des entrepreneurs, voire à des « agri-managers ». Officiellement employée comme saisonnière, Naïma a en réalité travaillé comme bonne à tout faire durant vingt ans et 7 jours sur 7, avant d’être licenciée sans un sou suite à un accident de travail.
Et pour une main-d’oeuvre privée de toute protection, cette violence commence sur les lieux de travail : faire des journées de dix ou douze heures dans les serres par 45 ou 50 degrés, tenir de folles cadences de ramassage, vivre sans protection au contact de produits toxiques, etc.
Elle se poursuit sur les lieux d’habitation, dans des conditions d’hébergement indignes, voire inhumaines. Elle se traduit dans l’espace public, où ces ouvriers agricoles immigrés, parfois sans droits, sont tout juste tolérés, lorsqu’ils ne subissent pas le racisme comme mode de gestion de l’ordre social.
Agriculture intensive, exploitation des saisonniers et des sans papiers, misère et dictature au Sud, consommation au Nord, immigration : des problèmes en apparence éloignés se révèlent ici structurellement liés.
L’enquête d’Herman démontre avec brio comment l’agriculture intensive est un véritable laboratoire de la régression sociale
en Europe et dans le monde.
Document 420 pages – 23 € ISBN 9782846261623 VAU 1476 Diffusion CDE—SODIS
Patrick Herman est journaliste-paysan près de Millau. Il a collaboré au Monde Diplomatique, Témoignage chrétien, L’Ecologiste et Politis et est également auteur de Changeons de politique agricole aux éditions 1001 nuits en 2001 et co-auteur avec José Bové de Numéro d’écrou 20671 U aux éditions L’Atalante en 2003.